AFAPREDESA

AFAPREDESA nace como respuesta civil a la lamentable situación de los derechos humanos, la incapacidad de defensa de los desaparecidos y torturados y de nuestra angustia como padres, hijos, esposas o hermanos ante la consecuencia de la invasión cívico-militar del Sáhara Occidental por Marruecos.
AFAPREDESA se constituyó el 20 de Agosto de 1989 en los Campamentos de refugiados de Tinduf. Es una Organización No Gubernamental saharaui de defensa de los Derechos Humanos, así reconocida por las leyes saharauis.
Es miembro observador de la Comisión Africana de Derechos Humanos y miembro de la Coalizacion Internacional para la protección de todas las personas contra las desapareciones forzadas.
Participa en el Consejo de Derechos Humanos de la ONU en Ginebra. También actúa ante el Parlamento Europeo.
AFAPREDESA ha sido proscrita por el gobierno marroquí, pero aún así continúa ejerciendo su actividad dentro del territorio ocupado.

viernes, 22 de agosto de 2025

Lettre ouverte à Mme Rima HASSAN sur son soutien aux thèses coloniales du Makhzen

 

Lettre ouverte à  Mme Rima HASSAN  sur son soutien aux thèses coloniales du Makhzen

Par Abdeslam Aomar Lahsen

Président de l’Association des Familles des Prisonniers et Disparus Sahraouis

AFAPREDESA



Madame Rima Hassan,

Aussi surprenant et grave que cela puisse paraître, la « militante et juriste en droit international » que vous êtes,  vient d’épouser, telles quelles, les thèses coloniales marocaines sur le Sahara occidental. En lisant le contenu de votre discours sur le « Sahara » divulgué sur les réseaux sociaux, j’aurais juré qu’il avait été dicté par un membre de la DST ou de la DGED marocaines, et non par la militante identifiée aux luttes anticoloniales, telle que vous êtes  connue dans le monde. C’est comme si un sioniste justifiait la conquête des terres palestiniennes au détriment des droits inaliénables du peuple palestinien.

La thèse du « différend entre le Maroc et l’Algérie », si chère au Makhzen, est reprise par vous dans une tentative de vider la question sahraouie de sa nature de décolonisation, inscrite en tant que telle par la Quatrième Commission de l’ONU depuis 1963. Une juriste aussi avisée et compétente que vous devrait être en mesure de discerner parfaitement la différence, en droit international, entre un litige ou un différend frontalier et un territoire, comme le sahraoui, dont le statut est distinct et séparé de celui des pays limitrophes. Par ailleurs, le statut distinct et séparé du Sahara occidental par rapport au Royaume du Maroc a été réaffirmé par toutes les sentences du Tribunal de Justice de l’Union européenne depuis 2015 à nos jours. Au Sahara occidental, il ne s’agit pas d’un conflit de délimitation de frontières, mais de la détermination des conséquences à tirer du statut du Sahara occidental en tant que territoire non autonome au sens de l’article 73 de la Charte des Nations unies.


 

Mme Rima Hassan,

Vous  nous sommez de ne pas comparer les questions palestinienne et sahraouie. Bien que cela puisse vous déplaire, les deux questions ont, bel et bien, des similitudes  frappantes:

·         Les deux territoires sont soumis une cruelle occupation par deux régimes animés par des prétentions expansionnistes. L’occupation de la Palestine est l’objet de multiples résolutions et avis juridiques. Celle des Sahara Occidental a  été condamnée   par l’Assemblée générale de l’ONU, dans sa résolution 34/37, exprimant sa « profonde préoccupation » face à la détérioration de la situation due à « la persistance et l’extension de l’occupation ». Cette résolution :

1.        Déplore profondément l’aggravation de la situation résultant de l’occupation persistante par le Maroc.

2.        Demande instamment au Maroc de participer à la dynamique de paix et de mettre fin à son occupation.

Les deux régimes nient l’existence des peuples autochtones et ne lésinent pas sur les moyens pour les éliminer, mettant en œuvre des politiques génocidaires sans précédent. Pour atteindre leurs objectifs respectifs, le Makhzen et le sionisme se sont alliés depuis longtemps et utilisent des méthodes similaires. Cette alliance criminelle se trouve aujourd’hui à son plein apogée, alors que le génocide contre le peuple palestinien est transmis en direct, et que le génocide contre le peuple sahraoui se poursuit en silence. Le génocide contre le peuple sahraoui est une vérité juridique irréfutable, prouvée par la première mission de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme qui a documenté les victimes des bombardements au Napalm et phosphore  blanc en 1976 ainsi que la sentence 1/2015 du juge Pablo Ruz de l’Audience Nationale d’Espagne, dictée le 9 avril 2015, dans le cadre de la Compétence Universelle.  Dans la dite sentence, il est avéré que : « Depuis novembre 1975, date de l'occupation du Sahara occidental par le Maroc – territoire qui était auparavant une colonie espagnole – et jusqu'en 1991, date du cessez-le-feu entre le Maroc et le Front Polisario, un groupe armé sahraoui, une attaque systématique et généralisée a été menée contre la population civile sahraouie par les forces militaires et policières marocaines : bombardements de camps de population civile, déplacements forcés de civils, assassinats, arrestations et disparitions de personnes, toutes d'origine sahraouie et précisément en raison de cette origine, dans le but de détruire totalement ou partiellement ce groupe de population et de s'emparer du territoire du Sahara occidental. Outre les arrestations, il y a eu des emprisonnements prolongés sans procès, certains durant de nombreuses années, et des actes de torture infligés à des personnes sahraouies par des fonctionnaires militaires et policiers marocains dans divers centres de détention officiels, situés aussi bien sur le territoire du Sahara occidental qu'au Maroc. Ces attaques, perpétrées contre la population sahraouie sur l'ensemble du territoire du Sahara occidental et menées par l'Armée et la Gendarmerie marocaines, auraient été impulsées par les hauts commandements de ces corps militaires et exécutées dans le but d'occuper le territoire du Sahara occidental et d'en prendre possession. »

 Par ailleurs, la déportation massive des populations sahraouies est reconnue  par les récentes arrêts du Tribunal de Justice de l’Union Européenne que estime que 75 % du peuple sahraoui a été déplacé et se trouve en dehors des territoires occupés suite l’agression militaire marocaine à partir de novembre 1975 (Point 127 des arrêts du TUEJ du 4 octobre 2024, pourcentage réaffirmé  dans le Point 156 du verdict rectifié le 15 janvier 2025).

 

Les colonies de peuplement est un autre point commun entre les deux situations mêmes si  celles des terres palestiniens ont fait couler, à juste raison beaucoup d’encre et ont été amplement condamnées  para la communauté internationale alors que celles des terres sahraouies a été délibérément occultées ou ignorées en dépit des proportions alarmantes de la présence des colons au Sahara Occidental.  Selon les données de la Commission Européenne environ 25% seulement de la population actuelle des territoires occupés est d’origine sahraouie (Point 128 des arrêts du TUEJ du 4 octobre 2024, pourcentage réaffirmé  dans le Point 157 du verdict rectifié le 15 janvier 2025).

 

·         Le deux peuples sont divisés par des murs qui négativement  impactent les communautés palestiniennes et sahraouis. Les deux murs reflètent des logiques coloniales similaires, visant à diviser des populations et à annexer des ressources ou des terres, tout en entravant l’autodétermination. Cependant leurs contextes, leurs échelles et leur visibilité internationale diffèrent, le mur en Palestine étant plus médiatisé et juridiquement contesté, tandis que le mur au Sahara occidental reste «oublié » malgré son impact dévastateur. Ce dernier est truffée de mines et pratiquement infranchissable pour les populations sahraouies depuis cinq décennies, empêchant totalement leur liberté de mouvement. Les familles sahraouies se trouvent séparées et divisées depuis 50 ans.

·         Les deux peuples ont un grand point commun : la Résistance. En effet, les peuples palestinien et sahraoui mènent depuis des décennies des luttes de résistance profondément enracinées dans leur quête pour le droit à l’autodétermination et la fin de l’occupation. En Palestine, la résistance prend multiple formes — de la résistance populaire et civile aux actions politiques et diplomatiques — face à une occupation israélienne prolongée, une expansion coloniale agressive et un génocide et blocus dévastateur, notamment dans la bande de Gaza. Au Sahara Occidental, le peuple sahraoui résiste à l’occupation marocaine depuis 1975, à travers une lutte diplomatique intense menée par le Front Polisario, reconnu par les Nations Unies comme représentant légitime, ainsi que par des mobilisations populaires pacifiques dans les territoires occupés, souvent réprimées avec violence. Bien que les contextes historiques et géopolitiques diffèrent, ces deux luttes partagent un même combat pour la justice, la dignité et la reconnaissance internationale de leur statut de territoires non autonomes dont le droit à l’autodétermination a été continuellement entravé par des puissances occupantes soutenues par des alliances régionales et internationales.

En guise de conclusion, bien que les dynamiques historiques, géopolitiques et culturelles spécifiques à chaque situation  nécessitent une analyse rigoureuse pour éviter les simplifications, les questions sahraouie et palestinienne présentent des similitudes en termes d'occupation, de déplacement, de résistance et de quête d'autodétermination communes voire identiques. 


Mme Rima Hassan

Vous reprenez,  mot à mot, la rhétorique de la marche pacifique. En fait, il s’agit de l’opération militaire marocaine, baptisée "Opération Oubou", qui fut lancée dès le 31 octobre 1975, précédant la Marche Verte qui débuta le 6 novembre. Cette initiative visait à créer un fait accompli sur le terrain avant le début de la marche.

Concrètement, environ 20 000 soldats de l'Armée royale marocaine pénétrèrent dans le territoire du Sahara Occidental à partir du nord-est. Leur avancée fut facilitée par le retrait stratégique et coordonné des troupes espagnoles de leurs postes avancés, notamment à Yderia, Hausa, Mahbes et plus tard Smara. Ce retrait, négocié en amont entre Madrid et Rabat dans le cadre des accords secrets qui ont conduit aux accords tripartites de Madrid, laissa un vide sécuritaire que les forces marocaines comblèrent immédiatement.

Cette période marqua le début des premières crédibles de violations massives des droits de l'homme dans le conflit. Des organisations internationales et des témoignages de Sahraouis ont depuis documenté de nombreux cas de disparitions forcées, de détentions arbitraires et d'exécutions extrajudiciaires visant spécifiquement la population civile sahraouie et les combattants du Front Polisario, qui s'opposait à la fois à l'occupation espagnole et à l'invasion marocaine.

La rhétorique officielle marocaine de l'époque, illustrée par les discours du roi Hassan II, jouait sur deux tableaux. D'un côté, il présentait la Marche Verte comme une initiative pacifique et spirituelle, enjoignant ses participants à "partager leur pain avec les Espagnols" s'ils les rencontraient. De l'autre, il adressait une menace voilée mais claire aux Sahraouis, laissant entendre que toute résistance serait traitée militairement, comme l'atteste la phrase : "...et si vous rencontrez d'autres [personnes], la vaillante armée [marocaine] s'en occupera."



Mme Rima Hassan,

Votre texte le plus polémique, est celui relatif à  l’Avis juridique de la CIJ puisse vous tenter de le vider de son essence aux profits d’interprétation visant  à le contourner et à contenter le Makhzen. Ainsi vous omettez  de rappeler que la résolution 3292 de l’Assemblée Générale de l’ONU avait conditionnée un tel Avis à la réaffirmation du principe d’autodétermination conformément à la Résolution 1514 du 14 décembre 1960. En effet, dans la partie diapositive de la résolution 3292, l’Assemblée Générale de l’ONU :

"Décide de demander à la Cour internationale de Justice, sans préjudice de l'application des principes énoncés dans la résolution 1514 (XV) de l'Assemblée générale, de rendre consultatif à une date rapprochée sur les questions suivantes : « I. Le Sahara occidental (Río de Oro et Sakiet El Hamra) était-il, au moment de sa colonisation par l'Espagne, un territoire n'appartenant à personne (terra nullius) ? »

Si la réponse à la première question est négative,

« II. Quels étaient les liens juridiques de ce territoire avec le Royaume du Maroc et l'entité mauritanienne ? »

L'avis de la CIJ de 1975 est un document pivot pour trois raisons :

1.    Il invalide la thèse de la terra nullius, reconnaissant l'existence d'un peuple sahraoui avec une organisation sociale et politique propre.

2.    Il rejette explicitement les arguments de souveraineté territoriale avancés par le Maroc et la Mauritanie.

3.    Il corrobore et renforce le principe d'autodétermination conformément à la Résolution 1514 (XV) du 14 décembre 1960 comme fondement juridique pour résoudre la question du Sahara occidental, principe qui reste, près de 50 ans plus tard, au cœur de l'impasse politique et du mandat de la Mission des Nations Unies (MINURSO).

Madame Rima Hassan,

Votre plaidoyer pour un État binational démocratique dans le conflit israélo-palestinien, tel que mentionné dans votre profil Wikipédia mis à jour le 12 août 2025, soulève des interrogations quant à sa cohérence lorsque vous semblez vous aligner sur les thèses marocaines concernant le Sahara occidental.

La Marche verte, que vous évoquez, a été condamnée par la résolution 380 du Conseil de sécurité des Nations unies en 1975, ce qui contredit l’image pacifique que vous pourriez suggérer. De plus, des actions militaires marocaines ultérieures, documentées avec l’utilisation de napalm et de phosphore blanc, ont marqué l’invasion du territoire.

Les récents affrontements au Sahara occidental, y compris la résurgence de l’"Intifada de l’indépendance" depuis 2005, mettent en lumière une guerre toujours en cours — et non un conflit gelé — remettant ainsi en question toute narration d’une unité maghrébine mutuellement consentie.

La Cour internationale de justice a statué en 1975 que le Maroc n’avait aucune souveraineté historique sur le Sahara occidental, une position juridique constamment réaffirmée par l’ONU. Ce constat semble entrer en contradiction avec l’argument des allégeances tribales que vous semblez soutenir.

Par ailleurs, le soutien militaire d’Israël au Maroc, y compris des livraisons d’armes utilisées dans le conflit au Sahara, a été officialisé dans le cadre des Accords d’Abraham en 2023. Si vous dénoncez les actions israéliennes ailleurs, ce rôle reste curieusement absent de votre analyse sur le Sahara occidental.

Je reste ouverte au dialogue pour clarifier ces points, dans l’esprit de votre engagement affiché pour la justice et la décolonisation.

Cordialement,

Chahid El Hafed, le 21 aout 2025